“Le Président SALL a raison de vouloir sortir du ‘carcan communautaire’ sur la dette”

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Dans le cadre de la coordination des politiques d’endettement à l’échelle communautaire, le conseil des ministres de l’UEMOA a adopté, lors de sa session du 04 juillet 2007 à Dakar, le règlement n°09/2007/CM/UEMOA portant cadre de référence de la politique d’endettement public et de gestion de la dette publique dans les États membres de l’UEMOA. Ce règlement comporte un certain nombre d’obligations pour les États, notamment l’élaboration d’une politique d’endettement précisant les orientations globales en matière d’emprunts publics extérieurs et qui est annexée à la loi de finances 2009, la mise en place d’un système d’information en vue d’assurer une plus grande transparence dans la gestion de la dette, la mise en place d’une structure de coordination de la politique d’endettement et de gestion de la dette publique.

 

Donnant suite à ce règlement, le Sénégal, par Arrêté Ministériel N° 05889 du 07 juillet 2008, a créé un Comité National de la Dette Publique (CNDP) qui a pour mission, entre autres d’élaborer, de coordonner et de suivre la mise en œuvre de la politique nationale d’endettement et de gestion de la dette publique ; de veiller à la mise en cohérence de ladite politique avec les objectifs de développement et la capacité financière de l’État ; de mener les analyses de viabilité de la dette publique et de la soutenabilité des finances publiques.

Ainsi, conformément aux engagements vis-à-vis des Institutions de Bretton Woods, l’analyse semestrielle de la viabilité de la dette publique, qui était jusqu’ici dévolue au Comité National de Politique Économique (CNPE) devient une des missions du CNDP. En sus du Règlement n°09/2007/CM/UEMOA du 4 juillet 2007, d’autres textes organisent le processus d’endettement au sein de l’UEMOA :

• Le Règlement N°06/2001/CM/UEMOA du 6 juillet 2001 portant sur les bons et obligations du Trésor émis par voie d’adjudication par les États membres de l’UEMOA modifié ;
• Le Règlement N°06/2013/CM/UEMOA du 28 juin 2013 portant sur les bons et obligations émis par voie d’adjudication ou de syndication avec le concours de l’Agence UMOA-TITRES ;
• L’Instruction 1/97 relative à l’appel public à l’épargne au sein de l’UMOA (marché financier).

Depuis l’atteinte du point d’achèvement de l’Initiative Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) en 2004, qui avait marqué la sortie du pays de la situation de non soutenabilité de la dette publique, une analyse de viabilité de la dette (AVD) est effectuée semestriellement par le CNDP et à chaque fois que de besoin notamment avant d’effectuer une action d’envergure comme les émissions d’obligations sur les marchés financiers internationaux.

Au Sénégal, à l’instar de beaucoup de pays en développement, la dette publique a repris une trajectoire ascendante au lendemain des initiatives PPTE et IADM (Initiative d’Allègement de la Dette Multilatérale). Elle est passée de 3076,2 milliards de FCFA en 2012 à 9176,3 milliards de FCFA en 2020. Le taux passe ainsi de 42,9% en 2012 à 63,7% en 2019. En effet, les besoins d’investissement du pays ont augmenté avec le financement de grands travaux et projets ambitieux initiés par le Président de la République et inscrits dans le cadre du Plan Sénégal Émergent (PSE) se traduisant par une hausse de l’endettement public. Le 31 décembre dernier, le Président avait clairement indiqué que le Sénégal pourrait dépasser le taux fatidique de 70% du PIB conformément à la norme de convergence de l’UEMOA. Comme indiqué par le Chef de l’État, les montants empruntés servent uniquement à financer les projets structurants du pays qui ont pour noms, entre autres : Le TER, le Parc Industriel de Diamniadio, les Zones Économiques Spéciales (ZES), le prolongement de la VDN3, le BRT etc…

Même si la dette augmente, elle est contrôlée et soutenable car le Sénégal a une signature crédible et c’est l’essentiel. S’agissant des critères de convergence, la pandémie de Covid-19 a eu raison de leur respect par les différents pays. Nous ne devons plus être enfermés dans ce que l’on pourrait appeler l’orthodoxie communautaire nous exigeant de ne pas dépasser la norme de 70% car les pays les plus développés dépassent largement ce taux. Prenons à titre d’exemples  la France, l’Italie et les USA. La dette publique de la France dépassera 100% du PIB pendant au moins dix ans a affirmé le Premier Président de la Cour des Comptes de France le 17 janvier dernier. La France a beaucoup dépensé pour soutenir ses entreprises et le secteur de la santé.

En 2020, elle s’est retrouvée avec une dette d’environ 120% du PIB et cette année elle devrait se chiffrer à 122,4% du PIB du fait des nouvelles dépenses pour soutenir l’économie. D’ailleurs, le 19 janvier dernier, l’État français a levé à travers l’Agence France Trésor 7 milliards d’euros dans le cadre d’une émission syndiquée d’obligations à 50 ans. C’est pourquoi le FMI l’a invitée à préparer un plan pour réduire sa dette. L’Italie est une des principales économies de la planète malgré une dette qui atteint 158% du PIB cette année. Ce nouveau pic jamais atteint depuis la seconde guerre mondiale reflète l’impact du plan de relance de 32 milliards d’euros qui portera le déficit public à 8,8% contre 7% précédemment.

L’Italie va vers le sens de l’économiste Jean Baptise SAY pour qui c’est l’offre qui crée la demande et non l’inverse. Les fonds serviront à financer le secteur de la santé submergé par la pandémie de Covid-19 et à relever les secteurs économiques les plus touchés. Les plans de sauvetage de l’économie américaine ont occasionné un déficit budgétaire à 16 % du PIB en 2020 et une dette à 104,4 % du PIB cette année.

Eu égard à ce qui précède faisons le choix comme l’a dit le Président de la République de « briser les chaines » imposées et finançons comme tout le monde notre développement, même si cela requiert d’aller au-delà du taux fatidique fixé par l’UEMOA.

* Oumar Khatab FALL

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