Les désirs des lobby LGBT ne doivent pas être des ordres (Par AbdouLatif Coulibaly)

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Les désirs et demandes du puissant lobby LGBT ne peuvent pas être des ordres pour l’humanité toute entière. Soyons clairs : je n’ai aucune animosité, encore moins de la haine qui puisse m’habiter à l’égard de ceux qui s’en réclament ouvertement ou sont encore restés dans l’anonymat, en exprimant, ici, ma pensée. Chacun est libre de faire ses choix dans la vie et d’opter pour les orientations qui lui plaisent de s’appliquer, mais que nul ne cherche à imposer à l’humanité ses choix, encore moins tenter de la forcer à adhérer aux orientations qu’on se donne soi-même.

J’étais en France, quand le ciel est tombé sur la tête de notre compatriote Idrissa Gana Guèye, pour avoir décidé de ne pas jouer un match de football avec son club et éviter ainsi, « pour des raisons personnelles », selon les explications fournies par son entraineur, de revêtir un maillot floqué de l’emblème LGBT. J’ai bien suivi les critiques de certains journalistes, tenant des propos quasi hystériques, allant même jusqu’à accuser le joueur de porter de la haine à l’égard des LGBT, mais j’ai aussi et surtout écouté certains commentateurs consacrés sur la scène médiatique française : hommes politiques, de bons pensants de la société bourgeoise, certains illuminés de la droite extrême et autres caciques de la société civile, défendant les causes des Droits humains.

Mon soutien appuyé au joueur Idrissa Gana Guèye relève de deux ordres de préoccupations. La première preoccupation trouve son fondement dans cette injustice qu’on veut lui infliger, en l’obligeant à poser un acte qui heurte sa conscience. La deuxième, quant à elle, est le résultat d’une peur qui me prend les tripes. Et comme l’écrit un commentateur français réfléchissant sur le sujet : « cette affaire Idrissa Guèye dit, à elle seule, beaucoup de cette ère nouvelle qui, insidieusement, s’installe. La doxa nous vend la liberté à tous les étages, mais l’objection de conscience est ravalée au sous-sol ». Et l’auteur cité d’ajouter avec lucidité : « la parole devient despotique, car elle a tendance à exclure toute pensée autre ». On en arrive, de plus en plus, à ne considérer juste et audible que « la seule parole qui enferme ce qu’il est seulement légitime de dire, un langage qui appelle à l’anéantissement de toute altérité ». Les termes du débat posé sont, me semble-t-il, à certains égards volontairement brouillés par certains. On peut essayer de comprendre qu’on discute dans nos sociétés de l’orientation sexuelle d’une personne homme ou femme, pour des raisons liées à la religion et autres. On ne peut, en revanche, et en aucune façon, en prendre prétexte pour discriminer et encore moins porter la violence sur elle ou lui. Nombreux sont ceux qui éprouvent certainement une sérieuse gêne devant les campagnes étouffantes des LGBT, car certaines d’entre elles constituent des entraves pour la liberté d’expression, en ce qu’elles s’acharnent à imposer le silence à ceux qui ne partagent pas leurs points de vue.

En quittant la France pour rentrer chez moi, j’ai laissé sur place la tourmente médiatique injustement fabriquée autour de l’international sénégalais. En ressassant les mots dits, en me rappelant les jugements de valeur définitifs entendus, en considérant les caricatures et mépris y affleurant, j’en suis arrivé à me poser la question de savoir si l’Occident n’avait pas tout simplement et collectivement perdu la raison, face à certains questions sociales, culturelles, voire religieuses portées en débat au plan universel et qui questionnent toutes les nations du monde. Ces nations sont interrogées, j’allais dire même rudoyées, dans le questionnement et dans cette manière de les interpeler, en ce que celles-ci ont de plus intime et de plus sensible : leur essence d’être humain. Cette attitude est caractéristique du monde occidental. Aussi, cette attitude procède-t-elle d’un aveuglement séculaire ayant pris racine en particulier à partir des Lumières, pour se renforcer au fil de l’histoire. Nos amis occidentaux se présentent souvent maladroits et prétentieux, car se montrant toujours incapables de comprendre le sens de l’histoire et sa marche inéluctable vers le progrès global, quoiqu’en pensent ceux qui travaillent à rebours de cette dynamique. Aussi, cet occident en oublie-t-il souvent que le monde a changé, les temps ont évolué. Ceux-là qui restent toujours obtus, dès lors qu’ils abordent certaines questions culturelles et sociales devant nous qui incarnons encore à leurs yeux l’arriération, pour ne pas reprendre le mot barbarie, le terme consacré par les époques révolues. Ils n’ont encore rien compris.

L’ancien président américain Barack Obama l’aura appris à ses dépens, devant le chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall, quand, lors d’un voyage officiel au Sénégal, il crût devoir s’adresser à son homologue africain, en le questionnant sur le sort réservé aux homosexuels dans son pays. Barack Obama reconnaitra d’ailleurs plus tard, quand il quittera ses fonctions, que l’une des rares fois où il a été pris à revers et gêné dans ses fonctions, lors de ses nombreuses visites à l’étranger, ce fut lors de son passage à Dakar, avec sa question adressée à Macky Sall et la réponse qui lui a été servie. Une partie de l’humanité, à la tête de laquelle le monde occidental a toujours trôné, en lui imposant sa civilisation, sa culture, sa religion et sa manière de voir les choses, de même que sa façon de considérer les êtres humains hors de son espace, vit aujourd’hui autrement sa relation à cet occident. Elle est plus avide de liberté et est devenue plus forte et mieux préparée à résister et à imposer sa volonté. Et l’Occident qui était arrivé à s’imposer partout, à la force des armes, au prix de massacres intolérables, de transgressions morales aux antipodes de l’éthique humaine et auxquelles son imagination fertile et diabolique pouvait le porter, ne saisit pas encore la marche inexorable de l’Histoire vers plus d’équilibre et de qualité dans les relations établies entre les humains. Tant pis pour lui !

En fait, l’hystérie déclenchée contre Idrissa Gana Guèye en France, prend naissance dans cette vérité encore difficile à faire saisir en Occident et en France en particulier. Cette hystérie, dis-je, s’abreuve et s’entretient à la source de l’activisme notable de forces politiques et sociales nostalgiques et rétrogrades, fortement coalisées, pour le triomphe éternel de la domination occidentale sur les autres. Ainsi, comme un bloc uni et discipliné, on doit se tenir droit, prêt à entériner tout ce que dit et décidé par l’occident. Quand ces forces nous demandent de soutenir publiquement des mouvements qui défendent une cause, quelle que soit la nature de cette cause, pour vu que celle-ci puisse être rangée dans la rubrique promotion des Droits de la personne, on doit, sans inventaire, obéir. Totalement absurde. Ceux qui vouent aujourd’hui aux gémonies l’international sénégalais pourront, sans aucun doute, gêner ce qui reste de sa carrière professionnelle de footballeur. Il ne faut pas se méprendre à ce sujet. Ceux qui sont derrière la cabale montée contre lui sont trop forts, car ayant réussi à faire peur partout et à tout le monde. Certes ! Cependant, ils pourront, par endroits et à certains moments, triompher sur une personne. Mais jamais ils ne viendront à bout de la liberté et du droit sur lequel le joueur sénégalais repose sa résistance.

La lettre à l’allure comminatoire qu’un officiel de la Fédération française de Football, en charge de l’éthique, a adressée à Gana Guèye, pour le sommer de s’expliquer face à son “crime” et dont le corps se réduit, ni plus ni moins, à son refus de porter le maillot à l’emblème LGBT, est inacceptable. Elle est inacceptable en ce qu’elle tente une violation de droit et de réduire à néant la philosophie et la base contractuelle qui justifie le travail du joueur concerné au Paris Saint Germain. Un gouverneur colonial n’aurait pas été pire, dans la manière de convoquer un « indigène » pour l’amener à s’expliquer sur une désobéissance supposée de sa part à l’égard de la volonté de l’autorité coloniale. L’allusion claire à l’origine de Gana Guèye dans la lettre, traduit le refoulement typique d’un subconscient taraudé par un passé colonial ayant laissé beaucoup de séquelles dans l’esprit de beaucoup de monde en France. L’intellectuel palestinien Édouard Saïd parlerait lui d’un néocolonialisme inconscient.

Parlant justement d’une cause qui tient à cœur le Palestinien Edouard Saïd, je ne suis pas sûr que le président du Paris Saint Germain, le qatari El Khelaïfi, aurait fait l’unanimité auprès de ses joueurs qui auraient tous accepté de défendre cette cause palestinienne en arborant pour le symbole, les couleurs de l’Etat palestinien au cours d’un match.

Les récalcitrants qui pourraient être nombreux n’auraient pas été lynchés comme le joueur sénégalais l’a été au cours de ces derniers jours en France. Sans honte, on nous aurait dit qu’il ne faut mêler politique et sport. Comme si en Palestine ne se posait pas dramatiquement la question du respect des Droits de la personne. Et comme si le conflit en cours aujourd’hui en Ukraine est en dehors des fourches caudines de la politique. Que nenni !

La lettre du Secrétaire chargé de l’éthique à la Fédération de football française pour rappeler à Gana Guèye les limites à ne pas franchir quand un travailleur immigrant est toléré en France pour y exercer son métier. Les termes de cette lettre sont en net porte-à-faux avec les engagements contractuels d’Idrissa Gana Guèye. Jugez-en vous-mêmes, en lisant les termes de l’engagement du joueur à travers la charte de l’éthique qui lie tous les joueurs du PSG. Au sujet des violations des droits de notre compatriote Idrissa Guèye, j’ai lu avec intérêt dans une publication diffusée sur le site Senego.sn par un de nos compatriotes résidant en France, le Dr Mansour Diouf, un inventaire complet des textes violés par l’autorité nationale de tutelle du football français, sommant Gana Guèye de s’expliquer. Je vous inviterai à prendre connaissance de son texte. Pour ma part, en citant l’auteur, je me contenterai de mettre en évidence la règle 50 de l’olympisme français qui est aussi un crédo, du moins théorique de la FFF, car celle-ci n’hésite pas à forcer sa violation outrancière de celle-ci, en appelant à des sanctions contre Idrissa Gana Guèye. « Aucune forme de publicité ou de propagande, commerciale ou autre, ne peut apparaître sur les personnes, les tenues, les accessoires ou, plus généralement, sur un quelconque article d’habillement ou d’équipement porté ou utilisé par les concurrents, officiels d’équipe, autres membres du personnel d’équipe et tous les autres participants aux Jeux Olympiques, à l’exception de l’identification – telle que définie au paragraphe 8 ci-après – du fabricant de l’article ou de l’équipement concerné, à la condition que cette identification ne soit pas marquée de manière ostensible à des fins publicitaires».

Il me semble que le débat est clos. A moins que l’on ne soit d’une mauvaise foi manifeste, ou que l’on soit obligé de pratiquer une ligne de masse, obligeant à dire oui, en tout instant et en toute circonstance, aux moindres désirs et demandes du lobby LGBT, afin de ne pas subir ses foudres et dont les représailles peuvent faire rendre gorge aux plus puissants de ce monde, a fortiori à un footballeur, de surcroît simple ressortissant d’un pays du Tiers monde.

Mieux, qu’est-ce que les censeurs ont dit de cette sortie du chef de la sécurité de la coupe du monde Qatar 2022 ? « Si un supporter brandit un drapeau arc-en-ciel dans un stade et qu’on le lui enlève, ce ne sera pas parce qu’on veut l’offenser, mais le protéger. Si on ne le fait pas, un autre spectateur pourrait l’agresser. Si vous souhaitez manifester votre point de vue concernant la cause LGBT, faites-le dans une société où cela sera accepté. Si vous achetez un billet, c’est pour assister à un match de football et pas pour manifester. Alors ne venez pas insulter toute une société. Nous ne pouvons pas changer les lois ou la religion pour les 28 jours de la Coupe du monde » (Abdullah Al Ansari, chef de la sécurité de la Coupe du monde Qatar 2022).

Le Secrétaire chargé de l’éthique à la Fédération de football française n’a point daigné interpeller M. Abdullah Al Ansari sur cette sortie, du moins dans les mêmes formes et termes qu’il a osé le faire pour le joueur originaire d’Afrique au sud du Sahara. Que je sache, Idrissa Gana Guèye ne s’est pas prononcé aussi clairement que le responsable qatari sur la question. Pourtant on lui a collé à tors l’étiquette d’homophobe en interprétant son absence du match Montpellier-Paris Saint Germain. Pourtant, d’aucuns se sont prononcés très clairement sur la question et cela n’a soulevé aucun tollé en Hexagone. S’agit-il d’une condamnation à géométrie variable ? Certainement parce que cette prise de position ne vient pas de l’Afrique et d’un africain noir. Ou encore, parce que l’Afrique n’a pas la puissance financière du pays organisateur de la prochaine Coupe du monde ou qu’un Africain n’est pas l’actionnaire majoritaire du club fanion de la capitale française.

Abdou Latif Coulibaly est ministre, secrétaire général du gouvernement du Sénégal.

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