Souleymane Jules Diop : “le comportement de mes compatriotes m’effraie et me désespère”

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De la plus insidieuse, la plus sournoise des manières, ce virus est en train de se propager dans notre pays et si l’on n’y prend garde, il arrivera un moment où plus personne, plus rien ne pourra l’arrêter.
Nous sommes une population jeune. Ce qui, il est vrai, constitue en soi une barrière biologique naturelle. Mais il ne faudrait pas oublier notre réalité, celle d’une population à l’espérance de vie peu estimable, au vieillissement précoce par le fait de nombreuses maladies chroniques que nous traînons faute de soins et en raison de nos choix de vie, de notre alimentation désastreuse.
En ces troubles circonstances, la seule protection que nous ayons est celle de notre Dieu et de nous-mêmes. Faire en sorte que le virus ne passe pas par nous pour aller tuer de pauvres innocents, souvent des vieilles personnes cloitrées, blotties, confinées, que nous aurons contaminées par notre comportement irresponsable et envoyé prématurément à la morgue.
Il est illusoire de penser que nous Sénégalais avons rendu un valeureux service à notre Dieu pour qu’il se montrât bienveillant à notre égard. C’est une illusion que nous entretenons hélas, au nom d’une prétendue vaillance d’un de nos prétendus ancêtres sur le chemin de la foi. Ailleurs, le virus tue en masse. Des sénégalais, eux aussi jeunes, mieux suivi au plan médical, innocents comme à leur premier jour, meurent par dizaines dans des hôpitaux de première classe.

Je m’exprime sur le sujet parce que le comportement de mes compatriotes m’effraie et me désespère. Même acheter un masque est un jeu : on regarde, touche, on essaie, et on s’en va bras ballant. On partage toujours le ver de thé à l’entrée de la maison, au coin de la rue, on se passe le Marlboro entre amis jusqu’au mégot, en la pinçant au coin de la bouche avec la même bravoure et la même insouciance inégalées.
Ce qui est perçu comme un geste de convivialité peut vite devenir un geste mortel, il faut s’en convaincre. La jeunesse, qui devait servir de muraille et d’étendard contre le virus, à l’avant-garde de la bataille pour la sensibilisation, s’adonne tous les soirs à un chassé-croisé avec les forces de l’ordre, comme revenant d’une parade joyeuse.

Le moment viendra où tout le monde se mettra à regretter amèrement la légèreté avec laquelle nous agissons face à cet hôte maléfique. Nous sommes très prompts à pointer la responsabilité de l’Etat. A juste raison puisqu’il doit répondre à une mission régalienne de premier ordre qui est la sienne, dans ce combat inégal contre un ennemi invisible. Mais que faisons-nous pour y aider ? Allons-nous attendre que de longues processions se mettent en branle en direction de Bel-Air, Yoff ou Saint-Lazare, pour enfin prendre conscience du danger qui nous guette ? On convoquera la pauvreté, le désoeuvrement, la responsabilité des décideurs politiques, ce ne sera pas assez pour justifier l’injustifiable. L’attitude de mes compatriotes, une fois encore, m’afflige, me sidère et m’épouvante profondément.

Souleymane Jules Diop via Facebook

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