Macky Sall et Abdoulaye Wade n’arrivent plus à se quitter, décidément. Deuxième entrevue publique en trois semaines. Trois, si l’on considère que l’actuel chef de l’Etat pourrait bientôt rendre une visite de courtoisie à Me Abdoulaye Wade. Ce dernier a été reçu, avant-hier samedi, par son successeur au palais, sept ans après. Une audience, avec tous les honneurs protocolaires, qui s’est tenue dans l’après-midi pour se terminer, en début de soirée, par une déclaration conjointe.
‘‘Au cours de leur entretien, les deux hôtes ont fait un large tour d’horizon de la situation politique nationale caractérisée par les questions relatives au processus électoral, au statut du chef de l’opposition qui seront reprises dans la cadre du dialogue national. Le président Abdoulaye Wade a fait des recommandations au président Macky Sall pour qu’il déploie tous les efforts nécessaires à la maitrise de la gestion du pétrole, du gaz et des autres ressources naturelles’’, a déclaré le chargé de la communication du Pds, Mayoro Faye qui a lu la déclaration.
Il n’a pas été question de problèmes domestiques uniquement, puisque les deux dirigeants se sont également inquiétés de la percée extrémiste qui secoue le continent africain, dans sa partie occidentale, notamment. ‘‘Les deux hôtes ont également abordé la situation sous-régionale et africaine, dominée par des enjeux sécuritaires. Constatant leur parfaite convergence de vue sur la question, ils s’engagent à unir leurs forces pour le retour de la paix et la consolidation de la stabilité. Ils exhortent tous les Sénégalais et tous les Africains à cultiver la paix, en privilégiant le dialogue et l’intérêt de l’Afrique’’, a poursuivi M. Faye. L’entente cordiale entre les deux hommes devrait se consolider avec une rencontre à venir.
Depuis l’intervention salvatrice du khalife général des mourides, Serigne Mountakha Mbacké, ce 27 septembre 2019 à l’inauguration de la mosquée Massalikoul Jinaan, les rapports se sont huilés entre Macky et Wade. Ils ont d’ailleurs ‘‘tenu à remercier vivement’’ le sage de Touba pour son acte.
L’actuel président de la République Macky Sall a été plusieurs fois ministre, Premier ministre et président de l’Assemblée nationale, sous le magistère du président Abdoulaye Wade (2000-2012) avant de tomber en disgrâce et de constituer son parti, Alliance pour la République (Apr) en 2008. Quatre ans plus tard, il remportait la Présidentielle et déclenche une procédure judiciaire connue sous le nom de traque des biens mal acquis visant 25 dignitaires du régime sortant dont Karim Wade, le fils de l’ancien président.
Ce qui creusera le fossé entre les deux leaders. En 2015, Karim sera condamné à 6 ans de prison et à 138 milliards de francs Cfa d’amende, élargi puis exilé dans la foulée en juillet 2016 à Doha. Plusieurs responsables de l’ancien régime connaitront également des séjours en prison pour d’autres motifs et les divergences entre les deux hommes frôlent l’inimitié. En 2019, la non-participation de Karim Wade à la Présidentielle (risque de la contrainte par corps) a radicalisé son père qui a menacé d’attenter à la stabilité du scrutin. Le président guinéen, Alpha Condé, intervient en organisant un tête-à-tête entre les deux hommes à Conakry. Une rencontre dont les termes de référence et engagements, de part et d’autre, sont toujours inconnus, mais a eu, à l’évidence, le mérite d’avoir radouci Me Wade.
Depuis sa réélection et son investiture en avril 2019, Macky Sall n’a cessé de poser les actes de la coexistence pacifique avec ses anciens frères de parti qui ont abouti à la deuxième rencontre (publique) en trois semaines avec son ‘‘mentor’’ Abdoulaye Wade dans un contexte de dialogue national.
