Littérature – Le Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr remporte le prix Goncourt 2021

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Revenue à Drouant, l’Académie a fait du romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr un des plus jeunes Goncourt de l’histoire. Son quatrième roman, “La plus secrète mémoire des hommes”, coédité par Philippe Rey et Jimsaan, mêle l’évocation du Malien Yambo Ouologuem à une réflexion sur la littérature.

C’est le sacre d’un auteur et d’éditeurs méconnus voire inconnus du grand public. Six membres de l’Académie Goncourt sur dix ont choisi de distinguer Mohamed Mbougar-Sarr à seulement 31 ans, pour son quatrième roman : La plus secrète mémoire des hommes (Philippe Rey – Jimsaan). Déjà salué par la critique, le romancier sénégalais et ses éditeurs obtiennent le titre suprême après Hervé Le Tellier, dont le roman L’Anomalie (Gallimard) avait généré l’an dernier en librairie un engouement jamais vu depuis L’Amant, de Marguerite Duras en 1984.

La confirmation de quantité de prix et de sélections

Ces plus de 450 pages entrent au panthéon de la littérature, après avoir déjà été retenues notamment dans les listes du Médicis, du Femina ou encore du Renaudot ! Le grand public découvre à peine Mohamed Mbougar Sarr quand la critique (8 des 14 critiques littéraires interviewés par Livres Hebdo) en faisait un favori du Goncourt. Ce fils de médecin, aîné d’une famille de sept garçons, a déjà collectionné les prix depuis son Sénégal natal : de philosophie, d’histoire, de la jeune écriture francophone, du roman métis ou encore prix Littérature-Monde – Étonnants Voyageurs pour Silence du chœur (Editions présence africaine, 2017). Meilleur élève des classes de Terminale au Concours général de 2009, passé en classes préparatoires littéraires au lycée Pierre-d’Ailly de Compiègne, avant de poursuivre son cursus à l’École des Hautes Études en Sciences sociales (EHESS).

Une étourdissante réflexion sur l’art d’écrire

Prodige des mots, Mohamed Mbougar Sarr mène dans La plus secrète mémoire des hommes une double quête. Celle de son alter ego, le jeune écrivain Diégane Latyr Faye, envoûté par Le labyrinthe de l’inhumain, le livre mythique de T.C. Elimane, un mystérieux auteur africain qualifié en son temps de “Rimbaud nègre”. Façon pour Mbougar Sarr de rendre hommage à l’auteur malien Yambo Ouologuem, prix Renaudot accusé de plagiat et tombé dans l’oubli, à qui il dédie son oeuvre.

Mais ce roman très dense déploie aussi une étourdissante réflexion sur l’art d’écrire, au fil de différents exercices de style : journal, récit, notes. Une écriture face à la vie, baignée dans la sensualité, l’introspection et des zestes de drôleries. Le vocable souvent de très haute tenue frôle parfois l’emphase, mais “sur le chemin du livre essentiel“, comme on le lit. Ou, comme le glisse l’un des personnages : “Un grand livre ne parle jamais que de rien, et pourtant, tout y est“.

Dans un voyage de Paris à Amsterdam, de Buenos Aires à Dakar, le XXe siècle défile : le colonialisme, la Shoah, mais surtout ce continent commun de la littérature qui tient tant à Mohamed Mbougar Sarr. Lui qui lit tous les jours et pour qui “la lecture est à tout moment une exigence, un refuge, une interrogation“. De reconnaître une “immense dette à tous ses professeurs et maîtres à l’école“.

Son titre, La plus secrète mémoire des hommes, qui sacre aussi des éditeurs méconnus, ne vient-il pas encourager cette communauté littéraire, directement inspiré d’une phrase de l’auteur chilien Roberto Bolaño, salué en préambule ?

Avec Franceculture

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